La délégation et ses effets

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Le directeur général délègue aux directeurs d’établissements, qui eux même subdélègueront aux chefs de service.
Déléguer, c’est laisser la responsabilité d’une activité à celui à qui l’on délègue, lui laisser le soin d’agir à sa place. On évoque souvent la notion de délégation de responsabilité en imaginant que celle-ci décharge le délégant de sa responsabilité au profit du délégataire.
En vérité, les conditions pour écarter la responsabilité sont restrictives et aboutissent fréquemment à une mise en cause du délégant qui se croyait à l’abri en confiant une mission à un professionnel de son équipe.

La délégation est un « transfert, limité ou non dans le temps, du pouvoir de prise de décision sur une action majeure entrant normalement dans le champ d’action du supérieur hiérarchique à un salarié faisant preuve d’autonomie. »

La jurisprudence concernant la délégation de responsabilité, nous enseigne que la délégation produira principalement des effets en matière pénale. Si ce champ de la responsabilité professionnelle suscite beaucoup d’inquiétudes auprès des acteurs du secteur relevant de l’action sociale, médico sociale et de la petite enfance, il faut noter que fort heureusement, le contentieux est rare.

Est-il nécessaire de préciser que lorsqu’un professionnel doit répondre de ses actes devant une juridiction pénale cela concerne des faits graves : blessures, homicides involontaires liées au non-respect des règles de prudence, de diligences édictées par la loi ou les règlements.
Le fait de savoir si la délégation opère ou non transfert de responsabilité revêt alors tout son intérêt puisque par un effet de substitution, c’est le délégataire qui se trouvera dès lors seul responsable de la violation des règles qu’il devait observer ou faire observer, ; la délégation mettant hors de cause le délégant.

Penchons-nous sur les conditions de validité de la délégation pour opérer d’abord un transfert de certains pouvoirs puis, par voie de conséquence, de responsabilité pénale du délégant vers le délégataire.

Pour que la délégation soit effective, il faut que le délégataire ait la possibilité de choisir et de décider pour agir. La jurisprudence a donc réuni trois critères doivent donc être réunis pour que la délégation soit effective: compétence, autorité et les moyens adéquats pour l’exercer.

Le délégataire doit être en mesure d’exercer la tâche qui lui est confié, il doit être pourvu de la compétence et de l’autorité nécessaires pour veiller efficacement à l’observation de la réglementation.

La délégation doit être précise et limitée : Le délégant ne peut pas transférer l’ensemble de ses pouvoirs au délégataire ce qui aurait de l’exonérer de toute responsabilité pénale au sein de la structure. La validité de la délégation est remise en cause lorsque les juges relèvent le manque de précision de l’acte de délégation : pour avoir un effet exonératoire, la délégation « doit être certaine et exempte d’ambiguïté » (Cass. crim., 27 févr. 1979, no 78-92.381 : Bull. crim., no 88) ou encore être « expressément consentie et bien déterminée » ( Cass. crim., 21 déc. 1982).

Les simple consignes de veiller au respect des règles de sécurité et d’hygiène si le contenu de ces consignes n’était pas précisé rendront la délégation sans effet.

Enfin, la jurisprudence nous enseigne que la délégation de pouvoirs n’est soumise à aucune formalité déterminée, c’est-à-dire qu’il n’est aucunement exigé un écrit. Ce qui est recherché avant tout par le juge c’est l’effectivité de la délégation.

En l’absence d’écrit spécifique définissant le champ de la délégation, c’est sur la base d’un « faisceau d’indices graves, précis et concordants » que les juges accepteront de confirmer l’existence et la validité du transfert de pouvoirs.

Concrètement la délégation se déduira souvent d’un profil de poste, d’une fiche de poste. Encore faut-il que le contenu des missions soit suffisamment détaillé pour que les tribunaux considèrent l’effectivité de la délégation.

Notons enfin que le transfert de responsabilité concerne principalement la sphère pénale : la responsabilité civile reste du ressort de l’institution qui a souscrit une assurance pour l’ensemble des dommages liés à son activité. La plupart des assurances souscrites couvrent en effet les dommages causés par les professionnels, les usagers et les personnes amenées à collaborer aux missions de la structure. Ainsi, qu’il existe ou non une délégation, c’est l’assurance de l’institution qui indemnisera les dommages consécutifs à une mauvaise exécution ou une inexécution d’un acte entrant normalement dans le champ de compétence du délégataire.

Outre les effets de la délégation d’un point de vue pénal, qui, on l’a vu, reste très marginal, le principal intérêt de la délégation est qu’elle va contribuer à définir clairement les missions du professionnel concerné par la délégation.

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